L'artillerie après les guerres de l'empire… période de 1827 à 1870
L’artillerie de la révolution puis de l’Empire, si elle utilise les matériels du système de Gribeauval montre de fortes évolutions sur le plan tactique. Résultant plus de l’expérience que de la doctrine, elle fait intervenir l’artillerie de manière plus intense et plus mêlée à la manoeuvre. Durant l’Empire, les guerres ont été marquées par l’emploi intensif de l’artillerie sans apporter aucune évolution notable, ni dans l’organisation, ni pour le matériel., Seule une réforme plus ou moins avortée de l’artillerie fut réalisée. Le système An XI, se basant sur le système de Gribeauval, consistait, pour l’essentiel, au remplacement des pièces de 4 et de 8 par une pièce de 6 livres et l’adoption d’un obusier de 5 pouces 6 lignes.La restauration et le système du maréchal Valée (1827).
Sous la Restauration, l’artillerie subit une transformation demeurée à la base de son organisation jusqu’à la veille de la seconde guerre mondiale, oeuvre du comité de l’artillerie créé aussitôt après la défaite de 1815 et dirigé par le général Valée.
Le système Valée introduit en 1827 un avant-train unique et, sur l’affût approprié à ce nouveau mode de traction, on place les pièces alors en service, toutes encore du système Gribeauval ou dérivées de lui : pièces de campagne de 12, 8 et 6 ; canons de 12, 16, 24 et 30 pour l’artillerie de place et de côtes ; obusiers de 6 et de 24 ainsi qu’un obusier de 12 de montagne. Ce système demeure en place jusqu’en 1853. On peut donc dire que les canons de Gribeauval ont marqué l’histoire de l’artillerie française durant plus d’un siècle. Il convient de noter que toutes les bouches à feu fabriquées depuis l’origine jusqu’en 1859 sont à âme lisse.
Le Second Empire et le système La Hitte.
Si le système Valée ne profite guère des progrès balistiques procurés par les tubes rayés, l’arrivée au pouvoir du prince Louis-Napoléon amena quelques changements. En 1850, il fit présenter au Comité d’artillerie son projet de système d’artillerie et en 1853, est adopté le canon-obusier de 12 modèle 1853 sur un affût de 8 qui sera connu sous le nom de canon de l’Empereur. Il remplace toutes les pièces de campagne (canons de 8 et de 12 ainsi que les deux obusiers du système Valée) et peut tirer le boulet plein, l’obus creux, l’obus à balles et la boîte à mitraille.
Le Comité d’Artillerie présidé par le général de La Hitte se tourne vers le système proposé en 1847 par le capitaine d’artillerie Tamisier dont l’obus oblong (et non plus sphérique) comporte des ailettes prenant les rayures lors du chargement de la pièce par la bouche. C’est en mars 1858, que le système de matériel rayé est adopté sous le nom de Système La Hitte. Ces pièces ont un tir réglé pour 3000 mètres et trois sortes de projectiles : l’obus ordinaire, l’obus à balles et la boîte à mitraille. Cependant, ce matériel se charge toujours par la bouche avec une fusée ne permettant l’éclatement en l’air qu’à deux distances alors que les Prussiens disposent déjà d’un canon rayé se chargeant par la culasse et d’une fusée réglable à volonté. C’est encore en 1858 qu’est adopté un canon rayé de 4 (calibre exprimé en kilogrammes et non plus en livres) auquel s’associe l’obus Tamisier comportant deux couronnes d’ailettes en zinc qui correspondent aux rayures du canon. Le canon-obusier de 12 et les canons de siège et de place de 12, 16 et 24 sont conservés après avoir été rayés. Des pièces nouvelles telles que les canons de 4 et de 12 de campagne ; les canons de 12 et de 24 de siège ; les canons de 12, 24 et 30 de place et de côtes ; le canon de 4 de montagne sont adoptés et font leurs preuves durant la campagne d’Italie.
Le système d'artillerie du général La Hitte (modèle 1858)… Une descendance prolifique !
d'après M. Decker & S. Leluc
Matériels de campagne
- Canon de 4 rayé de campagne Mle 1858 (pièce nouvelle, tables de construction du 14 fév. 1858)
- Canon de 8 rayé de campagne Mle 1858 (rayé postérieurement, en 1858). Transformation de canons de 8 de campagne Mle 1764 (initialement du syst. de Gribeauval) ou du Mle 1838 (tables de construction du 14 fév. 1858).
- Canon de 12 rayé de campagne Mle 1858… transformation du canon-obusier de 12 Mle 1853 (tables de construction du 14 fév. 1858)
Matériel de montagne
- Canon de 4 rayé de montagne Mle 1859 (matériel nouveau, tables de construction du 27 fév. 1858)
Matériels de siège
- Canon de 12 court Mle 1859. Transformation de canons de 12 (court) Mle 1764 (initialement du syst. de Gribeauval) ou du Mle 1838 (tables de construction du 14 fév. 1858)
- Canon de 24 court Mle 1866. Matériel nouveau adopté le 4 juin 1864.
Matériels de place
- Canon de 12 (long) Mle 1861-1865. Transf. de canons de 12 de place modèle 1732 ou 1775.
- Canon de 24 (long) Mle 1861-1864. Transf. de canons de 24 de place modèle 1732 ou 1775.
- Affût de casemate de place pour canons de 4 Mle 1858 ou 1859.
Matériels de côte
- Canon de 16 cm Mle 1858-60 (anc. canon de 30 de l'artillerie navale)
- Canon de 16 cm Mle 1864-66 (anc. canon de 30 de l'artillerie navale)
- Obusier rayé de 22 cm Mle 1864 (anc. matériel de la Guerre et de la Marine)
L'artillerie après la défaite de 1870…
Ce n’est qu’après la guerre de 1870 que l’artillerie vit son matériel se perfectionner par l’adoption successive des matériels suivants :
- Canon de Reffye en bronze se chargeant par la culasse (1873) ;
- Premier canon en acier (1875) ;
- Pièces du système de Bange de 80 mm et de 90 mm d’une portée et d’une précision plus grande ;
- Canons de siège de 120 mm et de 155 mm du système de Bange.
Tous ces travaux conduisent à l’adoption en 1875, d’un canon de 95 mm dû au colonel de Lahitolle.
Dès 1877, des canons de 80 mm et de 90 mm dus au colonel de Bange lui succèdent complétés par divers matériels de montagne (pièce de 80 mm), de siège et de place, de côtes.
Les recherches se poursuivent activement et portent dès 1886 sur des matériels à tir rapide. Ils conduisent à l’adoption, entre autres, des canons de 120 mm Mle 1878 et de 155 mm Mle 1877 du système de Bange.
Enfin, on voit apparaître le canon de 75 mm Mle 1897, première réalisation d’une pièce qui peut être réellement qualifiée de canon à tir rapide (cette dénomination a été utilisée pour des pièces antérieures mais devant les performances des nouveaux matériels ces pièces seront désormais désignées par le vocable canons à tir accéléré). Ce nouveau matériel donnait à l’artillerie française une énorme avance dont elle ne sut malheureusement pas tirer profit durant les années précédant la première guerre mondiale.